Détecter le « désir-être » versus le « devoir-être » : contribue au maintien de la santé mentale des individus au travail

Marie-Josée Michaud

Marie-Josée Michaud

Autrice, consultante en matière de santé psychologique au travail, leadership et mobilisation des ressources humaines.

Un article écrit pour les professionnels en orientation de carrière mais qui peut aussi aider à accompagner vos jeunes adultes !

En tant que professionnels du développement de carrière, il y a un objectif social, sociétal ainsi qu’individuel à rencontrer, soit : aider un individu à comprendre comment, au travers d’un rôle (carrière) choisi, il pourra contribuer positivement au développement de la société actuelle, tout en s’épanouissant personnellement dans et autour de ce rôle.

Durant votre pratique, il y a des personnes qui viennent vers vous avec plein d’idées, ou au contraire vide d’idées. D’autres qui sont persuadées qu’une seule carrière est possible ou au contraire, que toutes sont possibles, tant que l’on y met de la volonté! Vous sortez alors votre boîte à outils, votre expérience, votre expertise et votre savoir-être afin de les aider à cibler ce qui se rapprochera le plus possible de ce qu’ils sont réellement. Vous prenez le temps de faire tout cela, parce que vous savez ou vous avez probablement vu et vécu le résultat parfois dramatique sur la santé physique et mentale qui peut découler de la fameuse dualité entre le « devoir-être » versus le « désir-être ».

Le terme « dualité » est employé pour désigner une dissonance entre les rôles choisis (devoir-être) et le rôle que nous voulons réellement tenir dans notre vie (désir-être). La dualité est donc créée lorsque la réalité vécue n’est pas en phase avec la réalité souhaitée.

À l’aide de la neuroscience et de l’imagerie du cerveau, nous comprenons maintenant de plus en plus comment notre vision du monde ainsi que notre besoin de survie influencent notre perception de la réalité. Afin de survivre comme espèce, nous avons développé la capacité d’anticiper le danger qui risque de menacer notre existence dans le sens propre, comme au figuré. Étant donné que de nos jours et dans la plupart des environnements que nous connaissons, nous ne sommes plus en danger de nous faire « attaquer par un lion », nous remplaçons ce danger par un ressenti, par la perception dans notre environnement moderne de « ce qui plaît » et « ce qui déplaît ». Autrement dit, si je plais, je ne suis pas en danger et si je ne plais pas, je suis en danger de ne plus pouvoir exister dans le rôle choisi et même dans la société en général.

Et ce besoin de plaire à tout prix, parce qu’il est inconsciemment rattaché à la notion de survie, peut non seulement entraîner une dualité néfaste chez l’individu que vous accompagnez, mais peut aussi vous empêcher de détecter ce fameux « désir-être » qui est un facteur important vis-à-vis le sentiment du bonheur au travail. Je ne vous apprends rien en vous disant que quelqu’un qui aime son travail, qui a l’impression de contribuer positivement et qui se sent libre de choisir, même au risque de déplaire, aura plus de chance d’atteindre un sentiment de plénitude qui préservera sa santé psychologique.

Retenons que le « devoir-être » entraîne la plupart du temps un stress chronique, car cet objectif n’est souvent en place que pour répondre à notre besoin de survie. Et l’humain n’est pas fait pour être en mode survie. Ce sentiment de danger perpétuel entraîne un stress chronique qui, à la longue, pourrait engendrer des troubles anxieux, un burnout ou même une dépression.

Pourquoi ai-je dit précédemment que ce besoin de plaire à tout prix pourrait aussi vous empêcher de détecter le « désir-être » et ce, malgré toute votre bonne volonté?Parce que le cerveau est aussi en mesure de faire ce qu’on appelle un raisonnement motivé. Le raisonnement motivé, c’est lorsque l’on réfléchit comme un avocat plaidant sa cause. On va parfois redessiner la réalité afin d’arriver au résultat voulu, celui que nous croyons qui doit être, celui qui contribue à rendre notre histoire plausible. Il se pourrait donc que certains individus qui se présentent devant vous réussissent à déjouer vos outils ; sa logique semble implacable alors que vous croyez y déceler de l’incohérence mais ne semblez pas en mesure de la lui faire voir.  Vous n’arrivez pas à trouver les mots justes pour exprimer votre inconfort devant sa véhémence à prouver qu’il a raison de vouloir faire ce métier, alors que vous détecter que ce n’est probablement pas celui qui le rendra heureux.

Revenez sur les bases avec cet individu. Revisitez ces notions apprises en psychoéducation ou au travers de l’approche cognitive :

  1. À qui te fait penser ce métier ?
  2. Pourquoi te fait-il penser à lui ou à elle ?
  3. Comment crois-tu qu’il contribuera à te donner l’envie d’aller travailler tous les matins tout en ayant de l’énergie à la fin de ta journée?

Je vous propose ces questions, tout en sachant que vous en avez probablement de bien meilleures dans votre sac à outils. N’hésitez pas à les partager avec vos collègues dans vos commentaires. Soyez créatif en les adaptant à l’individu en face de vous avec le seul objectif suivant à rencontrer : l’aider à trouver la voie, le chemin vers cet enfant qu’il a été et qui avait plein de rêves et d’espoir. L’aider à voir comment il s’est transformé afin de plaire, afin d’exister aux yeux des autres et ce, au risque de ne plus exister à ses propres yeux!

À la radio, j’ai entendu le chanteur Marc Hervieux dire à peu près ceci, « Mon père était très fier de mon métier en informatique, j’y excellais et j’aimais bien. Mais après son décès, j’ai choisi de chanter, je suis revenu à mes anciennes amours »

 

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